Hautes-Alpes : le magnifique discours de Michel Roy, nouveau Président du Conseil Général

Allocution de Michel ROY
Président du Conseil Général 27/01/15

"Mesdames, Messieurs les conseillers généraux,
Mesdames, Messieurs les Directeurs, les chefs de service,
Mesdames, Messieurs les représentants de la presse
Mesdames, Messieurs,
Chers amis,
Alors que je me trouve ici, à cette tribune, face à vous, je regarde cette porte et je me dis que notre Président Jean-Yves DUSSERRE va la pousser, qu’il va entrer, qu’il va faire un bon mot, et qu’il va reprendre les choses en mains …
Pourtant, nous savons tous, depuis le samedi 27 décembre 2014, qu’il ne va plus nous envoyer de SMS pour prendre de nos nouvelles, qu’il ne va plus nous rappeler pour nous dire que le dossier est réglé, qu’il ne va plus apporter la « réponse qui va bien » ….
Je voudrais saluer la présence, aujourd’hui, dans cet hémicycle, de la famille de notre regretté Président, et adresser, au nom de l’assemblée départementale, toute notre compassion à son épouse Colette, et notre affection à sa fille Sylvie et à son fils Hervé.
C’est un moment chargé d’émotion pour nous tous, mais je sais qu’ils tenaient à être présents ce matin à mes côtés ;  j’y suis très sensible et je les remercie !
Il y a un mois, jour pour jour, alors que la neige arrivait enfin en quantité dans nos stations, pour la plus grande satisfaction des professionnels, des touristes, mais aussi de Jean-Yves, je crois que ce sont d’ailleurs ses dernières paroles, c’est donc par ce jour de neige où les bruits sont feutrés, avec la discrétion qui le caractérisait, que notre Président, Sénateur Jean-Yves DUSSERRE s’en est allé depuis son cher Champsaur, dans sa belle commune de Chabottes.
En période de vacances, entre Noël et le jour de l’an, histoire de ne pas déranger, de ne pas perturber les uns ou les autres. C’est d’ailleurs dans la plus stricte intimité qu’il a été accompagné vers son ultime demeure, conformément à sa volonté.
Les couplets trop élogieux de ceux qui, la veille, l’accablaient, les hommages de circonstances exemptes de toute sincérité, les tapages médiatiques trop bruyants pour être honnêtes, les récupérations mal venues… Non, vraiment il n’en voulait pas ! Jean-Yves était engagé dans la vie publique depuis 1977 parce qu’il avait un idéal, parce qu’il gardait une part de rêve, parce qu’il croyait plus que tout « au mieux vivre ensemble ».
Pourtant, le départ de Jean-Yves DUSSERRE a été un séisme d’une magnitude exceptionnelle !
Dans les Hautes-Alpes, bien sûr, où la terrible nouvelle est entrée dans chaque foyer et a suscité émotion et incompréhension, mais bien au-delà, car tous ceux qui ont croisé à un moment ou à un autre le chemin de cet infatigable défenseur de la ruralité et de la montagne  en conservent le souvenir d’un homme sincère, attachant et déterminé.
Comme tout séisme d’envergure, les secousses ont été violentes et nous les ressentons encore aujourd’hui, et nous les ressentirons encore pendant très longtemps, nous le savons tous !
Jean-Yves DUSSERRE a occupé tous les postes de la vie publique haut-alpine :
Conseiller municipal, Adjoint, Maire,
Conseiller général, Vice-président, Président,
Conseiller communautaire, Président du Communauté de communes,
Parlementaire suppléant, Sénateur.
Je me suis même laissé dire que, dès la 6°, à Dominique Villars il était délégué de classe. En montagnard aguerri, Il a gravi, un à un, tous les échelons à force de travail. Lorsqu’il lui arrivait parfois de trébucher, il ne faisait jamais porter le poids de son échec aux autres, et trouvait que la colère est mauvaise conseillère. Il savait d’où il venait, et avait constamment présent à l’esprit que s’il était élu, c’était grâce à la confiance des haut-alpins, et se faisait un point d’honneur à demeurer en toutes circonstances à leur écoute, à leur disposition.
Avant d’écrire ces quelques lignes, j’ai feuilleté le livre d’hommage qui se trouve dans le hall du Conseil Général, où tous ceux qui le veulent peuvent écrire quelques mots. Savez-vous ce qui m’a frappé ?
C’est le mot « MERCI » qui revient à chaque page :
MERCI pour ce que vous avez fait,
MERCI pour votre présence, votre écoute, votre disponibilité,
MERCI pour vos bons conseils, pour votre bienveillance,
MERCI, vous m’avez réconcilié avec la politique.
N’est-ce pas là la consécration d’une carrière d’un homme publique ?
Lui qui souffrait du désintérêt de la part de nos concitoyens pour la chose publique, lui qui qui vivait très mal le « tous pourris » ! Les terribles événements survenus dans notre pays, il y a quelques semaines, l’auraient profondément bouleversé, et je sais qu’il aurait entonné à plein poumon « La Marseillaise » lui, le fils de résistant !
Depuis le départ de Jean-Yves DUSSERRE, nombreux sont ceux qui m’interrogent en me demandant : "comment allons-nous faire sans lui ?"
En effet, au fil des années, avec son souci permanent de l’intérêt général, Jean-Yves avait su inspirer confiance aux hauts-alpins, et avec lui pas de nord, pas de sud … Jean-Yves DUSSERRE était les Hautes-Alpes, car comme il se plaisait à le répéter, ce qui est bon pour Gap est bon pour les Hautes-Alpes ; ce qui est bon pour le tourisme d’été l’est pour le tourisme d’hiver ; ce qui est bon pour l’agriculture l’est aussi pour l’économie…
Jean-Yves DUSSERRE croyait dans les Hautes-Alpes et dans les hauts-alpins …
Fier de nos richesses et conscient de nos faiblesses, il possédait ce bon sens des hommes de la terre, et savait précisément ce qu’il voulait faire, et pourquoi il voulait le faire.
Chez lui, pas de posture, pas d’incantation, du travail, du travail et encore du travail !
C’est en 1992 que nous avons rejoint ensemble les bancs de cet hémicycle, sous la présidence de Marcel LESBROS. Puis nous avons été sous la présidence d’Alain BAYROU, Vice-président.
Entre 2004 et 2008, c’est côte à côte que nous avons siégé dans l’opposition, alors qu’Auguste TRUPHEME était Président. Quatre ans durant lesquels Jean-Yves est resté mobilisé, combatif, déterminé … c’est d’ailleurs souvent lui qui nous « remontait le moral », car il parvenait à se projeter dans l’avenir.
C’est donc naturellement lui que nous avons porté à la présidence du Conseil Général le … avril 2008. Certes, parce que nous étions majoritaires, mais surtout parce qu’il avait su, à force de patience et d’abnégation, retisser des liens entre élus, et jeter des passerelles essentielles à un travail de groupe. Pour en avoir souvent parlé avec lui, ces trois premières années de mandature ont été douloureuses pour le gestionnaire qu’il était, car augmenter les impôts, pour un Champsaurin, c’est contre nature !
Mais nous l’avons fait, et les hauts-alpins l’ont bien compris, puisqu’en 2011, la majorité DUSSERRE fut reconduite. La période 2011/2014 a donc permis de concrétiser des projets qu’il portait personnellement, et auxquels il croyait par-dessus tout, car ils étaient porteurs de développement et donc d’avenir pour le département.
Je veux parler de :
L’Agence départemental de développement touristique et économique (ADDET)
Et de
L’Agence d’ingénierie territoriale (IT05)
Je ne m’attarderai pas sur la liste des réformes structurelles de cette grande maison, ni sur ses nombreuses concrétisations, au risque d’en oublier certaines ! Mais nous savons que la présidence DUSSERRE restera comme une présidence majeure - Peut être poussée par le contexte économique, je vous l’accorde, mais surtout guidée par la vision de Jean-Yves DUSSERRE, très impliqué dans la gestion de la collectivité, et expert dans chacune de ces compétences.
Je ne le trahirai pas en adressant à tous les collaborateurs du Conseil Général sa reconnaissance, car Jean-Yves DUSSERRE était très attaché au maintien et à la qualité du service public, et je sais qu’il était fier de l’engagement personnel et collectif des services du Conseil Général.
Si Jean-Yves DUSSERRE était fier du Conseil Général, nous, nous étions fiers de lui !
Sans offenser les candidats aux élections sénatoriales présents dans cette salle, je crois que nous étions fiers et heureux que notre Président soit le représentant des Hautes-Alpes depuis le 28 septembre 2014 à la Haute Assemblée !
Il avait d’ailleurs déjà pris toute sa place au Sénat, comme en témoignent les propos du Président Gérard LARCHER, qui avait reconnu en lui un homme d’une grande finesse, un humaniste, un homme d’engagements et de convictions.
Et puis, s’il n’y avait qu’une chose que nous devions retenir de la présidence de Jean-Yves DUSSERRE, ce serait sans aucun doute sa dernière sortie publique, le 18 décembre 2014 : à Briançon, dont M le Maire, présent dans cette assemblée, n’a pas la même couleur « politique » que celle de notre majorité, pour un investissement d’un million d’euros, et quand on sait nos contraintes financières, on comprend ce que signifie une telle somme, pour inaugurer un pont. Même si la voix de Jean-Yves DUSSERRE était déjà faible, ce jour-là, et que sa douleur était visible, il a insisté sur le symbole du pont « entre deux rives opposées, pour rapprocher les hommes et permettre le passage ».
Désormais, l’héritage politique de Jean-Yves DUSSERRE appartient à chacun d’entre nous. Pas à ceux qui s’en revendiqueront, mais uniquement à ceux qui appliqueront, dans leurs actes, ses enseignements, et conserveront présentes dans leur esprit ces paroles.
Tâchons de nous en montrer dignes, y compris au-delà du 29 mars 2015 !
En ce qui me concerne, j’en prends ma part de responsabilité. Je remercie les conseillers généraux qui m’ont confié la mission de conduire, jusqu’à son terme, ce qui aurait dû être la présidence de Jean-Yves DUSSERRE, si la maladie n’avait été plus forte.
La tâche ne sera pas facile, j’en ai bien conscience. Mais je sais pouvoir compter sur le soutien de mes collègues élus, mais aussi sur l’aide précieuse des services du Conseil Général !
Je vous remercie."