Alpes de Haute-Provence : Sisteron épinglée par la Cour régionale des comptes

Alpes de Haute-Provence : La commune de Sisteron épinglée sur plusieurs dossiers par la Cour régionale des comptes. Le contrôle a mis en exergue plusieurs irrégularités, que la commune est invitée à corriger rapidement. D’une part, en matière de marchés publics, Sisteron ne respecte pas systématiquement les obligations de publicité et de mise en concurrence. La commune dispose d’une marge de manœuvre fiscale contrainte dans la mesure où la pression fiscale y est forte au vu des comparaisons effectuées de façon nationale avec les communes de même taille. D’autre part, en matière de ressources humaines, la commune s’est arrogée des droits et des possibilités réservés aux communes de plus grande taille. Elle a ainsi rémunéré plusieurs de ses agents au-delà de ce qui était permis par le statut de la fonction publique territoriale. Son récent surclassement démographique lui offre toutefois la possibilité de régulariser ces situations. Le contrôle a également montré que la commune ne respecte pas la durée légale du travail, les agents travaillant, en moyenne sur 2012 et 2013, 1524,40 heures au lieu des 1 607 heures prévues par la loi.*

 

Le rapport de la Cour régionale des comptes :

Commune des Alpes-de-Haute-Provence, Sisteron (7 749 habitants en 2013, soit une augmentation de 4,34 % de 2009 à 2013) présente un certain dynamisme démographique et économique. La commune rayonne en effet sur un bassin de vie rural, dont elle constitue le pôle de services. Elle a été classée commune touristique en 2014.
Dotée de ressources fiscales plus importantes que la moyenne des communes de la même strate démographique (10,68 M€ en 2013 soit 1 378 € / habitant contre 666 € / habitant en moyenne pour la strate), Sisteron jouit d’une relative bonne santé financière. La commune présente un endettement maîtrisé, bien qu’en augmentation, l’encours de la dette étant passé de 7,36 M€ en 2009 à 10,41 M€ en 2013. Elle mène en effet depuis plusieurs années une politique soutenue d’équipement (21,9 M€ de 2009 à 2013), que l’épargne dégagée sur la période n’a pas suffi à financer. Sisteron doit également faire face à des dépenses de personnel importantes (8,56 M€ en 2013, soit 1 105 € / habitant contre 550 € / habitant en moyenne pour la strate), ce qui peut s’expliquer notamment par la faible intégration intercommunale et par l’exercice en régie de nombreuses activités. La commune dispose d’une marge de manœuvre fiscale contrainte dans la mesure où la pression fiscale y est forte au vu des comparaisons effectuées de façon nationale avec les communes de même taille (strate démographique de 5 000 à 10 000 habitants). Les taux des impôts locaux, stables depuis 2008, sont plus élevés que la moyenne de ceux des villes de la même strate, sauf pour la taxe d’habitation.
De façon générale, la chambre a constaté de nombreuses défaillances dans la gestion administrative et financière de la collectivité, notamment en matière de suivi des engagements hors bilan, de programmation des dépenses d’investissement, de tenue de la comptabilité d’engagement, de gestion de la trésorerie, de gestion des régies, et de production des données relatives aux emplois et aux effectifs. La chambre recommande à la commune de mieux contrôler les partenaires (délégataires et organismes subventionnés) qu’elle finance afin d’ajuster au mieux le montant de ses subventions.
Le contrôle a également mis en exergue plusieurs irrégularités, que la commune est invitée à corriger rapidement.
D’une part, en matière de marchés publics, Sisteron ne respecte pas systématiquement les obligations de publicité et de mise en concurrence. Le contrôle a ainsi révélé plusieurs domaines dans lesquels la collectivité ne passe pas de marchés (fournitures, transports scolaires, denrées alimentaires pour la cantine, etc.), ce qui est contraire au code des marchés publics.
D’autre part, en matière de ressources humaines, la commune s’est arrogé des droits et des possibilités réservés aux communes de plus grande taille. Elle a ainsi rémunéré plusieurs de ses agents au-delà de ce qui était permis par le statut de la fonction publique territoriale. Son récent surclassement démographique lui offre toutefois la possibilité de régulariser ces situations. Le contrôle a également montré que la commune ne respecte pas la durée légale du travail, les agents travaillant, en moyenne sur 2012 et 2013, 1524,40 heures au lieu des 1 607 heures prévues par la loi. La chambre considère en conséquence que le nombre d’heures supplémentaires effectuées par les agents et indemnisées par la commune serait moindre, si la commune respectait la durée légale du travail. La chambre a évalué le surcoût lié au paiement de ces heures supplémentaires à 202 639 € en 2013. 
Enfin, la commune devra revoir la délégation de service public relative à la gestion de l’abattoir municipal, la convention conclue en 1981 pour une durée de 99 ans ne respectant plus les règles légales. La commune devra donc sans tarder remettre en concurrence l’attribution de cette délégation de service public.
En termes prospectifs, la chambre note que l’aisance financière de la commune est appelée à se réduire dans les prochaines années, sous l’effet conjugué de la poursuite d’une politique soutenue d’investissement, d’une hausse des dépenses obligatoires et d’une baisse des recettes, au premier rang desquelles les dotations de l’Etat.
La commune devra donc se montrer particulièrement rigoureuse dans sa gestion administrative et financière. Elle pourrait à ce titre utilement mettre en place une gestion active de la dette et de la trésorerie. En effet, la commune, qui n’a pas renégocié ses emprunts, n’a pas pu optimiser sa dette en profitant de la baisse des taux. La fiabilisation des données et l’amélioration de l’information communiquée au citoyen et au conseil municipal apparaissent également nécessaires, plusieurs documents budgétaires n’étant pas correctement renseignés. La chambre régionale des comptes invite la commune à remédier à ces manquements.
La chambre formule dans ce cadre les recommandations suivantes :
Recommandation n° 1 : fiabiliser les annexes aux documents budgétaires.
Recommandation n° 2 : mettre en place une gestion active de la dette et de la trésorerie.
Recommandation n° 3 :
3.1 réorganiser les régies et revoir leurs textes constitutifs ;
3.2 mettre en place un dispositif effectif de contrôle des régies par la commune en application de l’article R. 1617-17 du code général des collectivités territoriales ;
3.3 donner suite aux observations issues des vérifications opérées par le comptable public.
Recommandation n° 4 : ajuster chaque année les emplois figurant au budget en fonction des effectifs réels.
Recommandation n° 5 : porter le temps de travail annuel des agents à 1 607 heures.
Recommandation n° 6 : mettre en place un système automatisé de contrôle du temps de travail.
Recommandation n° 7 : mettre un terme à la convention de délégation de service public en vue de la passation, si telle est la modalité de gestion retenue par la commune, d’une nouvelle délégation de service public conforme, notamment quant à sa durée, aux dispositions des articles L. 1411-1 et suivants du code général des collectivités territoriales.