Alpes de Haute-Provence : Sisteron répond point par point à la Cour régionale des Comptes

Alpes de Haute-Provence : La ville de Sisteron a présenté lundi soir en séance de conseil municipal, le rapport du contrôle de la Cour régionale des Comptes. Ce rapport a provoqué un débat et le conseil a pu répondre aux interrogations de nombreux habitants.*

 

OBJET : Chambre Régionale des Comptes PACA – Rapport d'observations définitives - Années 2008 et suivantes
Monsieur le Maire expose que le traditionnel audit de la Chambre Régionale des Comptes qui se fait tous les 6 ou 7 ans a eu lieu au cours de l’année écoulée. Il indique que par lettre en date du 30 octobre 2014, le Président de la Chambre Régionale des Comptes de PACA l’a informé de l’inscription de l’examen de la gestion de la Commune à partir de 2008.

Le contrôle de gestion a ainsi duré trois mois dans sa première phase. Conformément à l’article L.211-8 du code des juridictions financières, l’examen a ainsi porté sur la régularité des actes de gestion, l’économie des moyens mis en œuvre, l’évaluation des résultats atteints par rapport aux objectifs fixés par le Conseil municipal sachant que la Chambre ne peut émettre d’observations sur l’opportunité de ces objectifs. L’examen a aussi porté sur la situation financière, l’endettement, la gestion des ressources humaines, la commande publique et tous les domaines ayant trait à la vie de la commune.  A l’issue de la première phase de l’enquête, le magistrat instructeur s’est entretenu avec Monsieur le Maire le 6 février 2015 afin d’évoquer les différentes constatations de la Chambre.

Ensuite, de manière collégiale, la Chambre a arrêté, le 25 mars 2015, ses observations provisoires à caractère confidentiel, qu’elle lui a transmises à Monsieur le Maire par courrier en date du 21 mai 2015. Il a ainsi adressé une réponse écrite à la Chambre enregistrée au greffe le 5 août 2015.
Au terme de cette deuxième phase, la Chambre a arrêté, le 15 septembre 2015, ses observations définitives toujours à caractère confidentiel, par courrier le 28 octobre 2015. Il a dès lors, transmis au Président de la Chambre Régionale des Comptes une première réponse en date du 26 novembre 2015 modifiée le 8 décembre 2015.
La Chambre, par courrier reçu le 10  décembre 2015, vient d’adresser officiellement, le rapport d’observations définitives sur la gestion de la Commune depuis 2008 complété des réponses formulées par Monsieur le Maire.
C’est ce document définitif  qui est présenté lors de la réunion du Conseil Municipal de ce jour, avant sa communication publique qui ne pourra intervenir qu’après la séance en vertu de l’article R.241-18 du code des juridictions financières.

Le contrôle de gestion a donné lieu à une intense mobilisation des services communaux particulièrement le secrétariat général et les services des ressources humaines, financiers et techniques qui ont travaillé plusieurs centaines d’heures lors de l’instruction des magistrats financiers pour compiler et transmettre plus de 1400 fichiers dématérialisés, représentant pas moins de 15 000 pages d’archives et documents, et des centaines de photocopies et pour produire les réponses argumentées avec pas moins de 16 réunions de travail.
L’audit s’est passé dans d’excellentes conditions grâce à la qualité du travail réalisé par les services municipaux mais aussi grâce à la collaboration du Centre de Gestion des Alpes de Haute Provence et des services de l’Etat.

La commune a ainsi répondu à de très nombreuses questions de la Chambre. Dans le rapport définitif, la Commune relève avec satisfaction que les comptes sont considérés comme sains. La chambre parle même d’« une relative bonne santé financière…, un endettement maîtrisé…, une politique soutenue d’équipement… ».
Les sept observations de la Chambre sont principalement d’ordre technique. La Commune a d’ores-et-déjà mis à profit l’année 2015 pour apporter des réponses efficaces aux recommandations formulées par la Chambre dont certaines étaient déjà engagées avant l’audit de la Chambre Régionale des Comptes.

L’adoption en juin dernier par le Conseil Municipal d’un Règlement Interne de la Commande Publique en est une parmi d’autres. Le sur-classement démographique de la Commune, l’ouverture du chantier négocié avec les partenaires sociaux et les premières décisions de rattrapage de la durée légale du temps de travail, ainsi que la lutte rigoureuse pour limiter les heures supplémentaires, permettent déjà de solutionner certains points relevés en matière de gestion des Ressources Humaines.

La Commune souligne par ailleurs les améliorations à apporter dans sa gestion administrative et financière et a déjà mis en œuvre la plupart des mesures correctives et en adoptera d’autres dans les prochaines semaines.
Dans sa réponse, la Commune a aussi souhaité insister sur le fait que l’avenir de la situation financière de la Ville de Sisteron comme celui de la grande majorité des Communes de France, est d’abord entre les mains de l’Etat et de lui seul. La Commune aurait d’ailleurs apprécié que la Chambre mentionne clairement les dégâts de la politique de l’Etat impactant les budgets depuis 2011 et qui obligent les communes à réduire les services à la population et à augmenter les impôts locaux du fait de charges nouvelles très partiellement financées (Rythmes Scolaires).

Pour finir, la Commune se réjouit de l’utilité de l’audit réalisé qui, dresse un état des lieux qui a déjà permis d’apporter en seulement un an, la quasi-totalité des mesures correctives. Le rôle de conseil et d’accompagnement de la Chambre Régionale des Comptes est très appréciable même si sur certains aspects du rapport définitif, la Commune a exprimé ses réserves.

Le Conseil Municipal est invité à prendre acte de la communication et à débattre du rapport d’observations définitives de la Chambre Régionale des Comptes de PACA pour les années 2008 et suivantes ;

Il est demandé au Conseil municipal de bien vouloir :
- prendre acte de la communication et du débat relatifs au rapport d’observations définitives sur la gestion de la Ville de Sisteron arrêté par la Chambre régionale des comptes Provence, Alpes, Côte d’Azur pour les années 2008 et suivantes.
APRES EN AVOIR DELIBERE, LE CONSEIL MUNICIPAL PAR 27 VOIX POUR ET 1 ABSTENSION
Prend acte du rapport de la Chambre régionale des comptes et un débat a eu lieu.Sisteron épinglée sur plusieurs dossiers par la Cour régionale des comptes. Le contrôle a mis en exergue plusieurs irrégularités, que la commune est invitée à corriger rapidement. D’une part, en matière de marchés publics, Sisteron ne respecte pas systématiquement les obligations de publicité et de mise en concurrence. La commune dispose d’une marge de manœuvre fiscale contrainte dans la mesure où la pression fiscale y est forte au vu des comparaisons effectuées de façon nationale avec les communes de même taille. D’autre part, en matière de ressources humaines, la commune s’est arrogée des droits et des possibilités réservés aux communes de plus grande taille. Elle a ainsi rémunéré plusieurs de ses agents au-delà de ce qui était permis par le statut de la fonction publique territoriale. Son récent surclassement démographique lui offre toutefois la possibilité de régulariser ces situations. Le contrôle a également montré que la commune ne respecte pas la durée légale du travail, les agents travaillant, en moyenne sur 2012 et 2013, 1524,40 heures au lieu des 1 607 heures prévues par la loi.*

 

Le rapport de la Cour régionale des comptes :

Commune des Alpes-de-Haute-Provence, Sisteron (7 749 habitants en 2013, soit une augmentation de 4,34 % de 2009 à 2013) présente un certain dynamisme démographique et économique. La commune rayonne en effet sur un bassin de vie rural, dont elle constitue le pôle de services. Elle a été classée commune touristique en 2014.
Dotée de ressources fiscales plus importantes que la moyenne des communes de la même strate démographique (10,68 M€ en 2013 soit 1 378 € / habitant contre 666 € / habitant en moyenne pour la strate), Sisteron jouit d’une relative bonne santé financière. La commune présente un endettement maîtrisé, bien qu’en augmentation, l’encours de la dette étant passé de 7,36 M€ en 2009 à 10,41 M€ en 2013. Elle mène en effet depuis plusieurs années une politique soutenue d’équipement (21,9 M€ de 2009 à 2013), que l’épargne dégagée sur la période n’a pas suffi à financer. Sisteron doit également faire face à des dépenses de personnel importantes (8,56 M€ en 2013, soit 1 105 € / habitant contre 550 € / habitant en moyenne pour la strate), ce qui peut s’expliquer notamment par la faible intégration intercommunale et par l’exercice en régie de nombreuses activités. La commune dispose d’une marge de manœuvre fiscale contrainte dans la mesure où la pression fiscale y est forte au vu des comparaisons effectuées de façon nationale avec les communes de même taille (strate démographique de 5 000 à 10 000 habitants). Les taux des impôts locaux, stables depuis 2008, sont plus élevés que la moyenne de ceux des villes de la même strate, sauf pour la taxe d’habitation.
De façon générale, la chambre a constaté de nombreuses défaillances dans la gestion administrative et financière de la collectivité, notamment en matière de suivi des engagements hors bilan, de programmation des dépenses d’investissement, de tenue de la comptabilité d’engagement, de gestion de la trésorerie, de gestion des régies, et de production des données relatives aux emplois et aux effectifs. La chambre recommande à la commune de mieux contrôler les partenaires (délégataires et organismes subventionnés) qu’elle finance afin d’ajuster au mieux le montant de ses subventions.
Le contrôle a également mis en exergue plusieurs irrégularités, que la commune est invitée à corriger rapidement.
D’une part, en matière de marchés publics, Sisteron ne respecte pas systématiquement les obligations de publicité et de mise en concurrence. Le contrôle a ainsi révélé plusieurs domaines dans lesquels la collectivité ne passe pas de marchés (fournitures, transports scolaires, denrées alimentaires pour la cantine, etc.), ce qui est contraire au code des marchés publics.
D’autre part, en matière de ressources humaines, la commune s’est arrogé des droits et des possibilités réservés aux communes de plus grande taille. Elle a ainsi rémunéré plusieurs de ses agents au-delà de ce qui était permis par le statut de la fonction publique territoriale. Son récent surclassement démographique lui offre toutefois la possibilité de régulariser ces situations. Le contrôle a également montré que la commune ne respecte pas la durée légale du travail, les agents travaillant, en moyenne sur 2012 et 2013, 1524,40 heures au lieu des 1 607 heures prévues par la loi. La chambre considère en conséquence que le nombre d’heures supplémentaires effectuées par les agents et indemnisées par la commune serait moindre, si la commune respectait la durée légale du travail. La chambre a évalué le surcoût lié au paiement de ces heures supplémentaires à 202 639 € en 2013. 
Enfin, la commune devra revoir la délégation de service public relative à la gestion de l’abattoir municipal, la convention conclue en 1981 pour une durée de 99 ans ne respectant plus les règles légales. La commune devra donc sans tarder remettre en concurrence l’attribution de cette délégation de service public.
En termes prospectifs, la chambre note que l’aisance financière de la commune est appelée à se réduire dans les prochaines années, sous l’effet conjugué de la poursuite d’une politique soutenue d’investissement, d’une hausse des dépenses obligatoires et d’une baisse des recettes, au premier rang desquelles les dotations de l’Etat.
La commune devra donc se montrer particulièrement rigoureuse dans sa gestion administrative et financière. Elle pourrait à ce titre utilement mettre en place une gestion active de la dette et de la trésorerie. En effet, la commune, qui n’a pas renégocié ses emprunts, n’a pas pu optimiser sa dette en profitant de la baisse des taux. La fiabilisation des données et l’amélioration de l’information communiquée au citoyen et au conseil municipal apparaissent également nécessaires, plusieurs documents budgétaires n’étant pas correctement renseignés. La chambre régionale des comptes invite la commune à remédier à ces manquements.
La chambre formule dans ce cadre les recommandations suivantes :
Recommandation n° 1 : fiabiliser les annexes aux documents budgétaires.
Recommandation n° 2 : mettre en place une gestion active de la dette et de la trésorerie.
Recommandation n° 3 :
3.1 réorganiser les régies et revoir leurs textes constitutifs ;
3.2 mettre en place un dispositif effectif de contrôle des régies par la commune en application de l’article R. 1617-17 du code général des collectivités territoriales ;
3.3 donner suite aux observations issues des vérifications opérées par le comptable public.
Recommandation n° 4 : ajuster chaque année les emplois figurant au budget en fonction des effectifs réels.
Recommandation n° 5 : porter le temps de travail annuel des agents à 1 607 heures.
Recommandation n° 6 : mettre en place un système automatisé de contrôle du temps de travail.
Recommandation n° 7 : mettre un terme à la convention de délégation de service public en vue de la passation, si telle est la modalité de gestion retenue par la commune, d’une nouvelle délégation de service public conforme, notamment quant à sa durée, aux dispositions des articles L. 1411-1 et suivants du code général des collectivités territoriales.