Alpes-de-Haute-Provence : "L'ordre républicain a été respecté" Christophe Castaner reprend de l'air après une semaine (très) compliquée

Un peu de répit pour l'ancien maire de Forcalquier et député des Alpes de Haute-Provence, de l'Ubaye, Sisteron et Manosque. Ce samedi de mobilisation des Gilets Jaunes s'est bien mieux passé: "L'ordre républicain a été respecté" a indiqué à l'issue de l'acte 19  le ministre de l'intérieur. Christophe Castaner se montre satisfait après un 19e samedi de mobilisation des "gilets jaunes". 

A voir ICI

Le ministère a comptabilisé 40.500 participants dans toute la France, dont 5000 à Paris.

Christophe Castaner a souligné la logique de prévention appliquée aussi par les forces de l'ordre ce samedi. "Les trop nombreuses tentatives de pillage ont été stoppées", a-t-il assuré, évoquant à Paris 8545 contrôles préventifs à Paris, avec des saisies de matériel pouvant servir d'arme.

Dans toute la France, le ministère de l'Intérieur a comptabilisé 40.500 personnes dans les différents cortèges, dont 5000 à Paris. Une mobilisation inférieure à celle de la semaine passée.

Par ailleurs, lors de son intervention, Christophe Castaner a également transmis une pensée pour le policier parisien, victime d'un malaise cardiaque en marge de la manifestation, ainsi que pour la femme blessée à Nice.

Voilà qui va permettre à "Casta" de souffler et de reprendre de l'air après 10 jours (très) compliqués où  l'opposition avait demandé sa démission sautant sur l'occasion, la presse n'étant pas en reste le présentant comme "stagiaire" à l'image de la une du Point ou de Libé "Premier Hic de France ".
Après avoir repris de l'air, il va falloir, à présent qu'il ne semble plus menacé, reprendre de l'autorité et cela risque de prendre de longues semaines avec au milieu... de nouvelles mobilisations de ces "satanés" gilets jaunes doit-il penser et dont il n'avait forcément pas soupçonné l'existence lorsqu'il s'est battu pour obtenir le ministère de l'intérieur, il y a 6 mois , il y a une éternité...

 

Retour en arrière : ces 900 m qui ont mis Christophe Castaner dans l’œil du cyclone

 

C'est une bien mauvaise période que passe le Ministre de l'Intérieur Christophe Castaner. L'ancien député-maire de Forcalquier avait connu en 20 mois une ascension fulgurante. Après avoir été un des compagnons du 1er jour de la campagne présidentielle d’Emmanuel Macron, il était naturellement entré au gouvernement comme secrétaire d’État en charge des relations avec le parlement et surtout porte-parole du gouvernement. Aussitôt, il avait su "prendre la lumière" et retenir l'attention des médias par son approche communicante, latine et conviviale. Devenu l'un des (rares) ministres connus du gouvernement, il devait ensuite se dévouer pour prendre la casquette de responsable du mouvement La REM (En Marche!).

 

La parenthèse sera de courte durée. A la rentrée 2019, la crise ministérielle symbolisée par le départ de Nicolas Hulot et Gérard Collomb est l'occasion ou jamais pour Christophe Castaner de demander à son nouvel ami Edouard Philippe, Premier ministre, et à son ami-Président, d’obtenir ce qui est son rêve depuis toujours : le ministère de l’Intérieur. C'est chose faite en octobre 2018. Le "Graal" pour celui qui deux avant s'inclinait aux régionales, un aboutissement pour "kéké" qui a su sortir d'une jeunesse compliquée et qui en substance a su se faire tout seul.

 

C’était sans compter sur l'actualité où le ministre de l'Intérieur est en première ligne. Un mois après sa nomination, le 17 novembre: voici donc des gens qui s'habillent d'un gilet jaune et commencent à occuper les ronds-points. Problème : dès la semaine suivante, se mêlent à ces justes revendications un détonnant mélange d'extrémistes, anarchistes, casseurs, voleurs... C'est le début des (gros) soucis. Les critiques se font jour sur l'organisation, sur les LBD, sur l'attitude des policiers jugée trop ferme ou trop laxiste et tant d'autres commentaires...

 

Contre toute attente et en dépit de l'image que veut donner de lui ces derniers jours l'opposition, Casta " tient bon". On peut même considérer qu'il se crédibilise au fil des jours  et au fil des samedis d'action des gilets jaunes. Son contact permanent avec les forces de l'ordre est apprécié, les mots qu'il choisit aussi. Le climat s'améliore et le point d'orgue en est ce grand débat "à la maison" où son ami-Président vient à Gréoux-les-Bains parler transition écologique : une journée réussie, le beau temps revient à l'image du printemps qui s'installe. Pas pour longtemps...

                                                                                                                                                L'enchaînement de deux samedis noirs

Deux jours après commence une spirale infernale : le voilà pris en photo dans un restaurant huppé de la capitale "en protection rapprochée" avec une dénommée Clara. Mais comment a-t-il pu ainsi s'auto-piéger ? Tout le monde se pose la question  et "n'en revient pas". Chacun (ou presque) est aussi gêné aux entournures voire un peu plus. "Après tout il fait bien ce qu'il veut de sa vie privée". Mais une fois que l'on a dit cela, les images sont là, elles circulent, font le tour des réseaux sociaux et des médias qui aiment tant défaire ceux qu'ils ont fait. Chacun y va de son couplet sur le thème  "ce n'est pas grave, il fait bien ce qu'il veut, mais... quand même". Le sujet devrait être quasi-inexistant mais le mal est fait. Les unes des magazines people sont là et les humoristes pour lesquels c'est du pain béni s'en donnent à cœur joie. L'image encore fragile est écornée.
Tout ceux qui apprécient Christophe Castaner, et ils sont nombreux dans nos départements, espèrent alors que le temps va faire son œuvre et que cela sera vite rangé au rang des anecdotes même si certains y voit "un caillou dans la chaussure" dont il aura du mal à se débarrasser.

Las, samedi dernier, l'acte 18 des gilets jaunes tourne au vinaigre sur les Champs-Elysées... à 900 m du Noto où s'est déroulée sa soirée du samedi précédent : 900 m de distance entre deux faits pour l'un anecdotique et pour l'autre grave pour les commerçants concernés et l'image de la France. Tout se joue dans ces 900 m des quartiers les plus huppés de Paris : les images de la soirée, celles du Fouquets et des magasins en feu s'entrechoquent, faisant encore se raccourcir les distances et le temps qui les séparent dans un amalgame presque inconscient de l'esprit.

Le voilà en retrait, le visage fermé, lorsque ce lundi le président durcit le ton et lorsque le Premier Ministre décline les mesures tout en montrant ostensiblement qu'il reprend la main.

                                                                                                                                                       (Pas) drôle de choix : Cas'tagne ou Cas'toi

L'opération "il faut sauver le (bon) "casta " s'engage : le préfet de Paris saute mais les ennuis ne sont pas finis. Le Premier Ministre confirme sur France 2 qu'à aucun moment sa démission n'a été envisagée. Lui, La veille sur LCI, sur France Inter cette fois, déclare ce mardi regretter sa virée nocturne. Il dément s'être fait engueuler par le chef de l'Etat : « J'ai échangé avec Emmanuel Macron samedi toute la journée, je l'ai vu samedi soir, j'ai échangé avec lui à plusieurs reprises dimanche, je l'ai encore vu hier. À aucun moment je ne me suis fait engueuler », a-t-il déclaré à France Inter ajoutant « Mais j'aurais parfaitement compris que le Président de la République m'engueule, et en plus nos relations le permettent ».  Il ajoute aussi ne pas avoir envisagé de démissionner : "Je ne crois pas qu'être chef, ce soit de battre ma coulpe". Quant à la soirée, il regrette "Je me suis rendu à un anniversaire. Non pas dans une boîte de nuit, mais dans un restaurant. Ensuite, la presse people a expliqué - et vous la reprenez, dont acte - que c'était une soirée dans une boîte de nuit. La réalité, c'est un restaurant, connu à Paris, dans lequel je me suis rendu", tente Christophe Castaner. "J'ai vu la polémique. J'ai vu la mise en cause, y compris de ma vie privée, donc oui je le regrette. Mais je regrette surtout qu'aujourd'hui, on considère que, aller dans un restaurant pour rejoindre un anniversaire, ça puisse faire polémique et ça puisse faire des questions, y compris sur votre antenne", conclut-il le visage fermé. Mais devenir ministre, c'est quasiment accepter l'idée de ne plus avoir vraiment de vie privée ou si peu. En la matière, ce qui n'aurait dû être qu'une anecdote, est ressenti lourdement dans les Alpes du Sud et en Haute-Provence non pas par la nature de sa vie privée mais par son étalement.

Le voilà ensuite dans l'après-midi de mardi devant le Sénat contraint de s'expliquer devant les sénateurs et à quelque jours d'un nouvel acte des gilets jaunes. Il redit sa fermeté, confirme et précise les mesures et explique en substance que les consignes de fermeté n'ont pas été suivies.

Mais le brasier ne s'éteint pas, l'occasion est trop belle pour l'opposition (et les médias) de faire le lien entre ces deux images, sans le dire clairement d'ailleurs, et chacun  y va de sa demande de démission. Quant aux médias et en particulier les chaînes d'infos, voilà des plateaux tout faits avec les experts habituels qui y vont de leurs commentaires sur l'opportunité de voir le ministre de l'Intérieur démissionner au-dessus d'un gros titre "Castaner doit-il démissionner ?"

Derrière cette polémique une question, des questions : faut-il avoir le visage sévère pour être ministre de l'Intérieur, fonction où le champ d'intervention est (heureusement) bien plus large que le maintient de l'ordre ? La fonction est elle interdite à ceux qui sont originaires du sud ?  L'accent méridional est-il rédhibitoire, la convivialité d'un communiquant est-elle incompatible avec la fonction ?

Car après tout si sa démission est en l'air, a-t-il pour autant commis une faute dans l'exercice de sa charge ministérielle ? Ceux qui ne jugent que par le résultat constaté sont-ils dans le vrai ?

Mais nous sommes en 2019, et si sa démission n'est pas à l'ordre du jour, le voilà en CDD... de 4 jours jusqu'à samedi prochain.

 

Le vent a tourné pour "Casta" comme il tournera encore.

On le sait bien et encore mieux à Forcalquier : après la pluie c'est forcément... le beau temps, mais il est vrai que quand on est du sud on est bien peu aguerri... à la tourmente.

 

Jean-Marc Passeron

 

Photo : La Voix du nord

L'analyse de Libération ICI

Celle du Nouvel Obs ICI

Il est en tout cas loin le temps où dans une sérénité qu'il doit regretter, le ministre de l'Intérieur nous accueillait chez lui à Forcalquier pour "Porte à porte". L'occasion de revoir cette émission et de mieux comprendre sa personnalité très attachante.

 

Porte à porte : Christophe Castaner, maire de Forcalquier et député du 04 from D!CI on Vimeo.

 

un peu de répit
Christophe Castaner
Alpes de Haute-Provence