Publié par Adrien CITEAU le mar, 28/05/2019 - 18:33

Cela aurait pu être une affaire digne d'un excellent roman policier : un fonctionnaire de police de Gap soupçonné d'avoir informé des malfaiteurs sur une enquête en cours, et un magistrat qui fermerait les yeux sur ses agissements. L'affaire est plus compliquée que cela, et passablement erronée, vous allez le comprendre.
Le contexte est simple : ces derniers mois, les forces de l'ordre du Gapençais et de la région ont particulièrement brillé en matière de lutte contre les stupéfiants. Un premier coup d'éclat en mars avec la saisie de 80 kg de drogue à Gap, et la visite immédiate du ministre de l'Intérieur Christophe Castaner pour saluer le travail. Dans la foulée, en avril, 31 kilos supplémentaires étaient retrouvés dans une chambre d'hôtel de la ville. Enfin, la semaine passée, nouvelle opération à Gap : près de 60 000 euros saisis, 12 arrestations dont 8 mises en examen pour trafic de drogue et 3 mises en détention.
Il est apparu aux enquêteurs que la belle-famille de l'un des trafiquants, arrêté en mars, a repris ses activités illégales pour son compte. Sa compagne, son beau-frère et sa belle-mère font, en effet, partie des 12 personnes interpellées il y a quelques jours.
Depuis les débuts de l'enquête il y a un an environ, une rumeur persistante circule parmi les effectifs de police : l'un d'entre eux serait en contact avec les trafiquants et les informerait des avancées de l'enquête. Lors d'une écoute téléphonique, un trafiquant l'aurait mentionné, lui prêtant des renseignements qu'il aurait fournis. Inimaginable, d'autant qu'il s'agissait "de faux renseignements" selon le procureur Raphaël Balland.
Selon nos informations, l'un des policiers fréquentait le kinésithérapeute mis en cause, mais uniquement pour des raisons médicales. C'est de là, et des propos peu sérieux tenus lors des écoutes téléphoniques des malfaiteurs, que la rumeur serait partie. Le procureur parle, à juste titre, du phénomène du téléphone arabe amplifié par le nombre de fonctionnaires et, au bout de la chaîne, une rumeur malveillante sur fond de règlement de compte au sein du commissariat de Gap.
Selon nos informations, l'ambiance y est particulièrement éprouvante. Rappelons que les policiers gapençais ont vécu de plein fouet le suicide de deux de leurs collègues en quatre ans. Cette rumeur, discréditant un policier et pouvant entraîner des sanctions pénales lourdes de conséquences, avait donc tous les ingrédients pour s'auto-alimenter.
Le procureur de la République Raphaël Balland est au fait de tous les éléments. Il assure qu'en l'état, aucun magistrat ni policier n'est mis en cause par quiconque dans l'enquête d'avoir participé de près ou de loin au trafic de stupéfiants. Il ajoute qu'une enquête du parquet déterminera si des indiscrétions (erronées) ont été commises par un policier auprès d'un tiers au trafic, puis colportées jusqu'à des personnes impliquées dans le trafic.