Hautes-Alpes : Quand le Conseil Départemental épingle la Chambre régionale des Comptes qui l'a (un peu) épinglé

Comme c'est d'usage, au cours des 18 derniers mois, le Département des Hautes-Alpes a fait l’objet d’un contrôle de la part de la Chambre régionale des Comptes, portant sur les exercices 2012 et suivants. Si la qualité de la gestion et ‘‘l’effort indéniable de maîtrise des dépenses" sont soulignés, certaines remarques de magistrats ont eu le don de sacrement agacer le Conseil Départemental.

"Inexactitudes, raccourcis et erreurs d’interprétation": dans un communiqué, le Conseil Départemental des Hautes Alpes fait en effet  part de son mécontentement quant au travail des magistrats: Le Président et le Département sont critiqués sur des petites dépenses considérées à usage personnel, trois nuits d'hôtel injustifiées, des frais de déplacement entre son domicile dans le Dévoluy et Gap sont aussi contestés ou encore un déplacement en hélicoptère.

"Toutes ces remarques n'ont pas lieu d'être et il n'y a rien eu d'illégal", indique en substance le département dans un communiqué avant une conférence de presse qu'il organisera ce mercredi et où tous les éléments seront dévoilés.

Pour retrouver le rapport de la Chambre régionale des comptes, CLIQUEZ ICI.

Le point de vue du département :

L’examen a tout d’abord porté sur 4500 pièces demandées par la Chambre régionale. Afin d’apporter un éclairage plus précis, le Département a pris l’initiative
de compléter ces informations d’un rapport documenté et de 125 fichiers représentant au total 2180 pages d’analyse approfondie. À sa demande, le Président Jean-Marie Bernard a également été reçu par la Chambre, afin d’apporter tout son concours à la bonne instruction du dossier.
Malgré cette démarche documentaire volontaire de la part du Département, le rapport définitif de la Chambre régionale des Comptes ne diffère que peu de sa version provisoire. Et il comporte encore certaines inexactitudes, raccourcis et erreurs d’interprétation que le Département des Hautes-Alpes se doit de corriger, car jetant le trouble sur la qualité de sa gestion et la probité de ceux qui en ont la responsabilité.
En matière d’information financière et de comptabilité, si ‘‘l’effort indéniable de maîtrise des dépenses’’ du Département et sa capacité de désendettement sont salués par la Chambre régionale — ce, dans un contexte de baisse continue des dotations de l’État —, certaines dépenses ont été qualifiées ‘‘d’irrégulières’’ dans le rapport alors qu’elles sont parfaitement conformes aux missions du Département et résultent simplement d’erreurs marginales d’imputation comptable.
« Le Département traite 45 000 factures par an », précise Patrick Ricou, vice- président en charge des Finances. « Quelques-unes ont été mal fléchées en
interne, ce qui n’influe en rien la bonne gestion de la collectivité. »

  1. L’intervention du Directeur de Cabinet

Les dépenses évoquées ne sont en aucun cas irrégulières ; la Chambre reproche à la collectivité la manière dont elles ont été engagées. L’ancien Directeur de cabinet a validé des bons de commande et engagé les dépenses qui s’y rapportent en vertu d’un arrêté signé par le Président du Département (28 mai 2015), et conformément à la validation de ce type de pratique par le Conseil d’État en 2005.

 

Les achats évoqués concernent des réceptions données par le Président dans le cadre de ses fonctions. Le Département organise chaque année une quarantaine de manifestations — dont certaines en présence des représentants de l’État comme la cérémonie des vœux — réunissant pour certaines plus de 400 personnes.

 

Ces différents achats ont permis d’élaborer les buffets ponctuant ces réceptions, mais aussi d’assumer diverses obligations protocolaires et de sécurité.

 

Dans le cadre de son soutien aux acteurs locaux, le Département effectue autant que possible ses commandes alimentaires auprès de fournisseurs locaux et des cuisines des collèges des Hautes-Alpes.

 

Le rapport de la CRC a pointé ces achats en raison d’une erreur d’imputation comptable prêtant à confusion sur sa destination. Ces achats ont été faits sur le budget du Cabinet, régulièrement voté chaque année par l’Assemblée, et en constante baisse depuis le début du mandat.

 

Le Département des Hautes-Alpes considère que la délégation de signature au Directeur de cabinet est parfaitement régulière, notamment au regard de l’avis du Conseil d’État précité. Pour autant, et afin d’éviter toute ambiguïté, le Département a décidé en 2018 de mettre un terme à la délégation de signature en faveur du Directeur de cabinet.

 

 

 

  1. Les achats de représentation

La Chambre stigmatise un certain nombre d’achats pourtant réguliers mais ayant fait l’objet d’une erreur d’imputation comptable.

 

  • Il s’agit d’une part d’objets logotypés. Ces achats publicitaires correspondent à des remis institutionnels (stylos, clefs USB, règles d’écolier, etc.) valorisant le soutien du Département à certaines manifestations et événements sportifs et culturels du territoire.
  • Il s’agit d’autre part de la contribution du Département à l’organisation du Trophée des entrepreneurs (golf). Le Département a fourni des lots récompensant les vainqueurs des trois éditions ayant eu lieu en 2016, 2017 et 2018. Ces lots ont été remis en public, sur podium, en présence de nombreuses personnalités.

 

Sport et culture font partie des attributions conférées par l’État au Département (loi NOTRe). Le Département soutient ainsi plusieurs centaines de manifestations de ce genre chaque année.

 

Afin de mieux gérer son important volume de factures (plus de 45 000 par an), le Département a mis en place de nouvelles procédures internes plus efficientes. Et on notera que la Chambre régionale des comptes, dans le même rapport, souligne ‘‘‘un effort indéniable de maîtrise des dépenses’’ de la part du Département, et notamment une baisse de publicité et relations publiques (près de 8 %).

 

 

 

  1. Les déplacements du Président

 

  • Un vol en hélicoptère lié à la visite impromptue du Président de la République sur le Tour de France (arrivée à Serre Chevalier en 2017). Le Président a souhaité se rendre compte par lui-même de la capacité du réseau routier à absorber l’afflux de visiteurs (450 000 spectateurs).

 

Lorsque le réseau routier haut-alpin est entièrement bloqué du fait d’une manifestation, le seul moyen de se rendre sur place dans un contexte similaire — pour le Président du Département comme pour toute autre autorité ou service de secours, etc.) — est l’hélicoptère.

 

Le rapport de la Chambre régionale des comptes ne remet pas en cause le bien-fondé et la régularité de cette dépense mais le compte comptable auquel celle-ci a été imputée au sein du budget du Cabinet.

 

 

 

  • Trois nuits d’hôtel à l’extérieur du Département. Ces trois déplacements – au même titre que plusieurs centaines d’autres chaque année - relèvent pleinement de la fonction d’un Président de Département (Cour administrative d’appel de Paris), qui se doit d’honorer les rendez-vous de travail et manifestations importantes pour les projets du territoire.

 

- Le déplacement dans le Jura correspond à une visite d’une usine d’un des prestataires du Département. Et à la visite de l’événement ‘‘Made in Jura’’.

 

- Le déplacement à Antibes correspond à une rencontre avec le président du Département des Alpes-Maritimes.

 

- Le déplacement à Aix-en-Provence correspond à une invitation du magazine Montagne Leaders et à une rencontre avec la Présidente du Département des Bouches du Rhône.

 

La Chambre a souligné ces déplacements du fait qu’ils n’ont pas fait l’objet d’un mandat spécial. Le Département avance qu’un tel formalisme est malheureusement inapplicable pour les déplacements de dernière minute et l’exercice quotidien de la fonction du Président.

 

 

 

  • Les déplacements quotidiens. Le Président du Département ne dispose d’aucun logement de fonction. Un appartement d’appoint existe à l’Hôtel du Département, auquel le Président, pour sa part, a eu recours une dizaine de fois par an. L’existence de ce logement d’appoint n’est pas incompatible avec les indemnités kilométriques perçues pour l’utilisation de son véhicule personnel à des fins professionnelles, en l’absence de véhicule de fonction, à l’époque examinée.

 

Les déplacements défrayés par indemnités kilométriques correspondent aux trajets quotidiens du Président pour se rendre de son domicile à l’Hôtel du Département. Une situation profondément différente de ce qu’avance la Chambre quand elle limite la fonction présidentielle à sa seule présence en commission et en Assemblée. Et lorsque le Président du Département quitte son domicile, c’est évidemment pour se rendre à l’Hôtel du Département.

 

Ce dispositif n’est pas incompatible avec l’existence d’une carte carburant. Ces deux dispositifs de défraiement sont complémentaires et ne concernent pas les mêmes types de trajets. Malgré ces deux dispositifs, tous les frais de déplacement engagés par le Président avec son véhicule personnel n’ont pas été couverts.

 

Il est important de noter que la CRC a instruit ce dossier sans avoir préalablement demandé les justificatifs tenus à disposition par le Département. À noter également qu’une fois ces justificatifs transmis par le Département, la CRC n’a pas revu son observation en conséquence.

 

Afin d’éviter toute ambiguïté, et suivant les préconisations de la Chambre, le Département a depuis mis un véhicule de fonction à la disposition du Président.

 

On notera enfin que dans son rapport, la Chambre régionale des comptes salue une diminution des frais de mission et de déplacement des élus de 2,3 % en moyenne depuis 5 ans.

 

 

 

  1. La promotion  des agents

 

La Chambre fait, dans ce domaine des ressources humaines comme nombre d’autres, un cas général d’une situation particulière.

 

Comme le permettent régulièrement les procédures internes, Christine Settembre, agent de catégorie B, a été nommée en 2012 sur un poste vacant de chef de service (catégorie A). La publicité interne sur ce poste vacant a généré 4 candidatures. La sienne a été retenue en raison de compétences unanimement reconnues par un jury dont le Président ne faisait pas partie. Compétences qui ne sont par ailleurs pas remises en cause par la Chambre dans son rapport.

 

Après 5 années passées à ce poste de catégorie A, la classification de cette agent a été réévaluée en mars 2017 afin de mettre en conformité son grade avec sa fonction. Pour cette raison, cette promotion n’a pas fait l’objet d’une déclaration de vacance de poste ni de publicité afférente.

 

Sur la période contrôlée, entre 2012 et exercices suivants, le Département a procédé à 406 promotions et avancements et des situations similaires à celle-ci se sont présentées avant elle. Mais également depuis puisque telle est la façon de faire du Département à l’égard de l’ensemble de ses agents.

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