Publié par Samir MATHIEU le jeu, 20/02/2020 - 19:26

Antoine de Baecque, spécialiste de l'histoire du crétinisme, raconte dans un livre l'histoire d'une enfant du Queyras arrachée de son pays en 1835, dite crétine des alpes, et dont le chant a conquis Paris après la Salpêtrière.
Derrière la fameuse expression « crétin des Alpes », qui fleurit régulièrement la logorrhée du capitaine Haddock, placée entre « moule à gaufres » et « saltimbanque », se cache une pathologie bien réelle : le crétinisme. L'historien Antoine de Baecque, déjà parti à la rencontre de ces dégénérés des alpages dans un essai érudit, Histoire des crétins des Alpes (Vuibert), en 2018, réitère par une version douce le récit romancé de la vie d'un spécimen rare : Eugénie. Moins d'un mètre de haut, quasi muette, 17 dents, oreilles plates, « larynx volumineux, col court saillant, déjeté par un goitre bilobé », la crétine est cueillie dans les Alpes en 1835.
Lors d'une mission scientifique dans les vallées du Queyras, près de Briançon, par un aliéniste carriériste, « le bon docteur Falret », lequel entendait grossir sa collection de 113 idiotes à la Salpêtrière, ces « êtres femelles abrutis et défigurés » que sont les crétines. « Bizarrerie de la nature » au corps et à l'esprit guère plus matures que ceux d'une enfant, Eugénie va connaître à Paris le destin d'une bête de foire exhibée au public, tel un Elephant Man au féminin. Une trajectoire à laquelle l'historien, grâce à une injection de fiction, parvient à donner vie.
Rencontre avec cet historien et écrivain qui s'est penché sur de nombreux récits relatant le "crétinisme des alpes" et qui en a sortie un livre : Eugénie.