Publié par Barbara Tornambé le lun, 02/03/2020 - 22:54

Elle l'a annoncé ce lundi soir. Delphine Bagarry, députée de la 1e circonscription dans les Alpes de Haute-Provence, quitte le groupe parlementaire LREM. Une décision qui intervient seulement quelques jours après l'annonce du gouvernement de recourir à l'article 49-3. Delphine Bagarry a indiqué sur notre antenne regretter ce choix pour faire adopter le projet de réforme des retraites. Elle a dénoncé des méthodes "autoritaires".
Si la députée a salué "certaines avancées ou orientations", elle explique dans un communiqué être aujourd'hui en "désaccord avec beaucoup de dispositions législatives".
Le communique. "C’est avec émotion mais avec responsabilité que je vous annonce que je quitte le groupe parlementaire « La République En Marche » au sein de l’Assemblée nationale. Cette décision est en cohérence avec l’orientation politique qui a toujours été la mienne et sur laquelle j’ai été élue : engagement pour une politique humaniste et sociale, une politique de co‐construction avec les citoyens, les associations et les corps intermédiaires. Je dois saluer certaines avancées ou orientations que je soutiens comme la stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté, les volontés de diminution des inégalités de destin par la priorité donnée aux premiers âges de la vie, les orientations pour la protection de l’enfance, l’appui aux initiatives innovantes concernant l’insertion des personnes précaires. Cependant, depuis le début de la législature, je me trouve en désaccord avec beaucoup de dispositions législatives, de décisions gouvernementales, de messages politiques émanant de la majorité présidentielle. Je ne peux plus cautionner la dérive sécuritaire, le durcissement des politiques migratoires avec un recul des droits des étrangers, une orientation budgétaire pour des mesures individuelles au détriment de politiques publiques ambitieuses sur le plan social et environnemental. Le renouvellement politique a eu lieu avec l’élection de nouveaux député∙e∙s et une parité presque complète au sein du groupe parlementaire. Mais je constate que les pratiques n’ont guère évolué : la promesse de co‐construction, de consensus avec les autres forces politiques, n’a pas été tenue. LaREM devait travailler avec tou∙te∙s, elle se retrouve contre tou∙te∙s. L’enchaînement et la multiplicité des réformes précipitées ne laissent pas le temps de la concertation et obligent le recours aux ordonnances ou au 49‐3 qui confèrent à l’exécutif une mainmise écartant de fait les parlementaires et les citoyen∙ne∙s de toute discussion ou amélioration. Je regrette de n’avoir pas réussi au sein de mon groupe à faire émerger une politique sociale et collaborative plus audacieuse. Ne me retrouvant pas dans la méthode du Gouvernement et l’utilisation inappropriée du 49‐3, je quitte le groupe La République En Marche. Fidèle aux valeurs défendues durant ma campagne des élections législatives, je continuerai à me mobiliser activement pour les sujets écologiques, démocratiques et solidaires, ainsi que pour la diminution des inégalités sociales et territoriales."
Son communiqué de presse :
Je me suis exprimée contre l’utilisation du 49-3 la semaine dernière au travers d’une tribune signée avec plusieurs de mes collègues, invitant le gouvernement à chercher d’autres solutions.
Une réforme d’une telle ampleur ne peut faire l’impasse sur la consultation des parties prenantes, le temps de la réflexion et du travail et surtout le dialogue démocratique, exercé par les représentant·e·s direct·e·s des citoyen·ne·s que sont les député·e·s.
C’est pourquoi je regrette que ce temps parlementaire nous ait été « volé », d’une part par l’obstruction parlementaire, et d’autre part par une procédure d’examen inadaptée à un tel texte.
La réforme des retraites doit être une grande avancée sur le plan de la solidarité, de la prise en compte de la pénibilité des métiers, des mobilités professionnelles, des carrières heurtées et de l’espérance de vie en bonne santé.
Elle est l’occasion de réinterroger le travail comme un continuum prenant en compte la formation professionnelle, la prévention, les possibilités de réorientation et les cessations progressives d’activité.
Elle est l’occasion pour les entreprises et les travailleurs de réfléchir ensemble à l’avenir professionnel de chacun dans le temps pour ne plus subir comme une fatalité une incapacité liée à l’âge ou à la pénibilité d’un métier.
Elle est l’occasion de revaloriser les salaires des fonctionnaires en relation avec leur niveau de compétence et non de l’échéance de leur cessation d’activité.
Je suis favorable à la réforme des retraites et malgré les points d’avancées sur le texte qui nous sera soumis cette semaine, certains m’interpellent encore : la prise en compte de la pénibilité, des carrières longues et la sauvegarde des pensions de la fonction publique.
Je continuerai mon travail parlementaire de manière constructive : le 49-3 ne doit pas être la fin du débat démocratique, le débat au sénat, les conclusions de la conférence de financement, les concertations avec les différents syndicats doivent encore enrichir cette réforme. Le Gouvernement a repris certaines avancées proposées par les parlementaires et les partenaires sociaux, mais ça reste insuffisant : les prochains examens du texte devront considérablement l’enrichir pour qu’il soit à la hauteur des enjeux du XXI° siècle.
Pour cela, nous aurons besoin d’un véritable débat à l’Assemblée nationale. Les semaines à venir seront décisives à la fois pour l’Assemblée, son image auprès de ceux qu’elle représente et l’avenir même de l’exercice démocratique en France. J’y prendrai ma part et mes responsabilités.
Delphine BAGARRY
Députée des Alpes de Haute-Provence