Publié par Jean Eymar le mer, 23/11/2022 - 10:23

Le skipper de Fortinet-Best Western a franchi la ligne d’arrivée de la plus mythique des transatlantiques après 13 jours, 7 heures, 40 minutes et 20 secondes de course. À l’issue d’un incroyable finish autour de la Guadeloupe, Romain est parvenu grâce à un sacré sang-froid à prendre la 10e place, une incroyable prouesse. Malgré la dureté des conditions, les fronts à traverser et le tempo intenable en tête de course, il a su tirer le meilleur de son IMOCA pour continuer sa montée en puissance. De quoi faire le plein de confiance !
Il n’y a rien d’anodin à boucler la Route du Rhum, monument à part dans le cœur des marins. Elle dit l’abnégation, la ténacité, la capacité de résistance et le sens de l’adaptation de ces héros des mers, passés des conditions virulentes de l’automne breton à la chaleur des tropiques. Romain Attanasio le sait, lui qui s’est battu comme jamais pour aller au bout et se hisser dans le ‘top 10’, son objectif initial.
Au départ, tenir face au déluge
Le marin s’est préparé dans ce but-là au fil d’une saison intense. Le skipper de Fortinet-Best Western s’est notamment aguerri dans des conditions dantesques (à la Vendée Arctique, 17e) et a impressionné au Défi Azimut (8e). De quoi plonger avec enthousiasme dans le grand bain de cette Route du Rhum qui s’est avérée particulièrement harassante. La transatlantique a été fidèle à sa réputation avec une succession de fronts à passer et de conditions difficiles. Durant les premiers jours, il a fallu résister aux chocs violents du bateau retombant dans les vagues, aux coups de vent et à une mer déchaînée. « Le bateau s’explose contre les vagues, c’est le déluge, il faut tenir », raconte-t-il il y a dix jours.
Résistant face aux problèmes techniques
Dès le 5e jour, c’est la technique qui lui joue des siennes. Confronté à des problèmes de générateur, Romain doit économiser au maximum la charge de ses batteries. « Ça va le faire », s’amuse-t-il alors qu’il n’utilise plus que ses hydrogénérateurs et ses panneaux solaires. Ses capacités de résistance et de résilience lui permettent de tenir le coup et surtout de rester au contact du ‘top 10’.
Positionné légèrement plus à l'Est que ses rivaux aux Açores, sa trajectoire vers le Sud-Ouest et les alizés est linéaire. Pourtant, il n’est pas épargné par les affres des conditions météos, ces grains soudain ou la pétole (manque de vent) localisée. Calé ensuite au portant, la trajectoire ajustée vers les Antilles, Romain pouvait s’évertuer à son « match dans le match » : se rapprocher au maximum du ‘top 10’.
Il s’est accroché jusqu’au bout
Mais là encore, il faut composer avec les tracas du bord : le bout permettant de rouler le grand gennaker casse puis des soucis de connexions limitent ses interactions avec la terre. « C’est chaud mais tout va bien, je continue à m’accrocher », certifie Romain. Bien décidé à tout donner jusqu’au bout, il a abordé dans la journée de mardi le périlleux contournement de la Guadeloupe. Les dévents autour de l’île rendent alors la progression très difficile. Dans ces dernières heures à ne pas ménager ses efforts, Romain excelle. Ainsi, il creuse l’écart avec Tanguy Le Turquais (Lazare) puis dépasse Sébastien Marsset (Mon Courtier Energie – Cap Agir Ensemble), son ex co-skipper. Mieux, il se bagarre pour la 10e place avec Pip Hare (Medallia) et finit par remporter ce « match dans le match ».
Un final à couper le souffle avant de savourer les joies de l’arrivée sous la chaleur guadeloupéenne. Cette aventure, menée également grâce à l’implication à chaque instant de son équipe, est une nouvelle illustration de la constance de Romain dans les compétitions les plus prestigieuse de la planète voile. Il compte en effet quatre participations à la Transat Jacques Vabre, deux Route du Rhum donc et se prépare plus que jamais afin de prendre le départ, dans deux ans, de son troisième Vendée Globe.
© Vincent Olivaud / #RDR2022
SA RÉACTION À CHAUD
« Je suis super satisfait parce qu’il y a une semaine je n’avais plus de communication, plus de météo et plus de classement surtout. Avant-hier, je devais faire un choix de bord, je n’avais qu’un fichier vieux de trois jours ! Finalement, le vent était dans le bon sens et j’ai retrouvé tout le monde. J’ai réussi à repasser devant Lazare (Tanguy Le Turquais) qui a eu un problème de safran, puis j’ai retrouvé Pip (Hare). La bouée de Basse de Terre est dans une zone sans vent, et j’ai réussi à bien enchaîner, à tirer les bons bords pour en sortir et j’ai ainsi dépassé Pip. La course était hyper dure, c’est la première fois que je fais une transat où je ne me lave pas. Je n’ai rien mangé, on n’avait rien le temps faire. C’était intense, le vent n’était pas simple, on a quasiment passé un Pot au Noir dans l’Atlantique avec des grains et de la pluie. J’ai fait la course à l’économie d’énergie après mes problèmes de générateur. Aux Açores, j’ai failli arrêter et finalement ça a tenu jusqu’ici. Je suis très content de mon bateau et de mon équipe. Ça n’a pas été une année facile, ils ont pris en main plein de choses. Ils ont tout géré, ils se sont occupés du bateau et de moi. Je suis très content d’être là. J’ai passé le dernier mille à penser au drame, je connais bien Alex (Picot), je suis triste, cela fait partie des drames de mer. »
SA COURSE EN CHIFFRES
Heure d’arrivée : 16 heures, 55 minutes, 20 secondes (heure de Guadeloupe) / 21 heures, 55 minutes, 20 secondes (heure de Paris)
Temps de course : 13 jours, 07 heure, 40 minutes et 20 secondes
Vitesse moyenne sur l’orthodromie (route directe) : 11,08 nœuds
Vitesse moyenne réelle : 12,64 nœuds
Écart avec le premier : 1 jour, 14 heures, 3 minutes et 55 secondes