
40 ans de "radio libres" : Quelle histoire !
C’était en 1981, il y a 40 ans déjà, François Mitterrand mettait en œuvre dès le lendemain de son élection l’une de ses promesses de campagne à savoir l’autorisation des "radios libres " et des radios locales en leur ouvrant la fameuse bande FM
Comme un prélude à la décennie globalement heureuse et festive des années 80 , c’est un formidable vent de fraîcheur qui va souffler aussitôt dans tout le pays sachant que certains avaient déjà anticipé cette ouverture de quelques mois ! On parlait alors de "radios pirates" qui se cachaient poursuivies par les gendarmes et les techniciens pour repérer leurs émetteurs!
Ainsi et pour la première fois les habitants accédaient à une explosion de contenus mais aussi à une autre forme d’information locale via la radio. ce fut aussi l'opportunité pour de nombreux artistes d'accéder enfin à la diffusion de leurs chansons sur les ondes générant le formidable élan de créativité des années 80. En effet jusque-là, seules les radios périphériques étaient autorisées à émettre. Elles auront d’ailleurs beaucoup de difficultés à comprendre le mouvement de la FM, la snobant au début et finissant par la rejoindre "aux forceps "ensuite jusqu’à ce qu’il ne reste plus justement que la bande FM.
Les premières années furent celles d’une créativité immense mais aussi d’une grande confusion sympathique. En effet souvent sous forme associative, les premières radios comprenaient quelques premiers permanents et un nombre incroyable de bénévoles s’improvisant, et souvent avec réussite, animateur de radio. Ce sera d'ailleurs pour beaucoup l'occasion de débuter leur carrière: d'Arthur à Cammille Combal , les stars des media d'aujourd'hui viennent souvent de la radio et de l'opportunité offerte par "les radios libres" de commencer dans le métier. Quant aux ressources de ces radios, la publicité fut d’abord interdite jusqu’à la manifestation coup de poing d’NRJ à Paris, un tournant, qui a permis l’accord du gouvernement. Jusque-là chacun y allait de son idée pour contourner l’interdiction de la publicité ! Quant aux autorisations d’émettre, là aussi la plus grande confusion régnait avant que l’État ne vienne y mettre de l’ordre en créant la Haute Autorité de la communication audiovisuelle puis la CNCL, ancêtre historique de l’actuel CSA.
Dans les Alpes du sud comme ailleurs ce vent de folie similaire à une épopée, a raisonné dans chaque ville avec des acteurs politiques qui s'en sont vite mêlés… En effet la gauche tout comme la droite s’est dit à l'époque qu’il y avait là quelque chose de stratégique et chacun a créé quasiment dans chaque ville sa propre radio pour porter la bonne parole… Ils s’apercevront vite que c’était une erreur.
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Mais les choses sont ainsi faites, les grands groupes se sont rapidement organisés pour récupérer cette si belle opportunité d’audience et de chiffre d’affaires. Chacun y est donc allé de ses emplettes pour acheter telle ou telle radio et créer des réseaux tout cela reconduisant à une nouvelle centralisation finalement guère plus élargie qu'avant avec un seul nouvel entrant majeur, le groupe NRJ. Mais à deux exceptions près:
- La persistance de l’existence des radios associatives comme RAM, Fréquence Mistral, Radio Zinzine dans nos territoires qui, exception française, obtiennent toujours des fréquences faisant perdurer l’esprit de diversité et de créativité sans contrainte d’audience et de chiffre d’affaires des années 80.
- Les radios indépendantes professionnelles dites de catégorie B qui ont su persister en apprenant à travailler ensemble jusqu’à créer au milieu des années 90 un GIE, celui des indépendants, devenus la première audience de France encore aujourd’hui et dont Jean-Marc Passeron fut l’un des administrateurs pendant plusieurs années. Aujourd’hui sans "Les Indés" beaucoup de radios n'existeraient plus car cela leur a permis d’accéder au marché publicitaire national dont elles dépendent malheureusement quelques fois beaucoup trop avec une sécurisation pas forcément génératrice de créativité et de prise de risques.
Alors 40 ans après, la radio menacée par le digital, se remet en cause à tous les points de vue et en particulier avec l’émergence cette année du DAB +, l’équivalent de l’arrivée de la TNT pour la télévision qui va permettre à chaque Français de recevoir beaucoup plus de radio dans une meilleure qualité et avec beaucoup d’informations associées. D!CI Radio développera d’ailleurs ses programmes sur la quasi-totalité de la région Sud/Provence-Alpes- Côte d’Azur. notons d'ailleurs que cette folle soirée histoire "des radios libres " n’est pas sans rappeler celle plus récente et plus difficile de la télévision locale...
Cette formidable histoire, ces quatre décennies ont marqué aussi l’histoire des Alpes du sud puisque ce sont ces radios qui vous ont accompagnés et qui vous accompagnent encore chaque jour et ce sont avec ces radios que nous avons tous vécues tous les temps forts de l’actualité et de la vie de nos territoires.
Sans refaire un historique précis (voir ci-dessous), C’est Radio5 et la famille Bertolotti qui a donné le ton dès le printemps 1981 dans les Alpes du Sud avec un premier émetteur installé dans une petite camionnette dans une station-service au sud de la ville de Gap (!) avant de s’installer plus confortablement à Romette. Et c'est là que beaucoup dont "JMP" à 14 ans vont faire leurs débuts! Au même moment, Fréquence 101 qui deviendra Fréquence Agora se lance aussi à Gap (elle deviendra bien plus tard Chérie FM). Dans la foulée c'est Pass'Montagne à Briançon qui deviendra NRJ Briançon Serre-Chevalier, RBV à Briançon que Jean-Marc Passeron transformera en Alpes 1, Radio Lavande à Digne, radio Mont-D'or à Manosque, Radio Galène à Sisteron et tant d'autres. L’une des premières radios très professionnelles sera RTM à Gap, la RAM bien entendu d'Embrun qui est maintenant dans quasiment toutes les Hautes-Alpes, Radio Zinzine (radio communautaire et d’expression), Fréquence Mistral, Kiss Fm dans la vallée de l'Ubaye, Drac radio dans le Champsaur qui deviendra Lalaradio puis la Radio Plus. Ajoutons à cela le beau succès d’Europe2 qui cartonnera dans les Hautes-Alpes comme dans les Alpes de Haute-Provence à la fin des années 80. On ne saurait oublier RCF radio chrétienne qui aura beaucoup de vitalité avant d’être rattrapée par les problèmes budgétaires. Ajoutons aussi que ces dernières années des nouveaux entrants sont encore arrivés Oxygène, Radio Imagine sous forme associative mais très professionnelle et la dernière née D!CI Radio 90.2.
Le véritable tournant de l’ensemble de ces radios a été l’arrivée du numérique à la fin des années 90 et a complètement transformé la diffusion, la programmation musicale, la gestion des antennes et qui, c’est vrai , enlèvera un petit peu de l’esprit des "radios libres", de l’interactivité et de ce sentiment, toujours perçu avec indulgence par les auditeurs, d’amateurisme si sympathique du début des années 80
Mais le plus grand succès en terme d’audience, de chiffre d’affaires et d’ampleur de l’ensemble de ces années ont été sans aucun contexte l’aventure Alpes 1 devenue pendant des années la radio et de loin la plus écouté de France avec jusqu’à 30 % d'audience cumulée. Un record et un score que peu de radios ont atteints comme celui de chiffre d’affaires par habitant ce qui n’est pas sans rappeler la success story de D!CI TV elle aussi créé par Jean-Marc Passeron.
Une épopée donc et beaucoup de changements au fil de ces décennies qui s’expliquent par l’engagement passionnel hors normes qu’il faut avoir pour s’occuper ou travailler dans une radio et qui conduit forcément à la nécessité de trouver au bout de six ou sept ans, un relais, une suite plus ou moins réussie d’ailleurs en fonction des cas de figure.
Reste aussi de ces 4 décennies, des personnes qui ont fait carrière dans toute la France jusqu’à de très fortes responsabilités en commençant en radio dans les Alpes du sud ou d’autres qui ont grandi avec ses radios qui sont devenues des stars nationales à l’image de Camille Combal des Orres ou Cyril Féraud de Digne-les-Bains.
Reste surtout le constat de ce formidable vent de liberté de 1981 dont il ne tient qu'aux acteurs de la radio d’aujourd’hui de le relancer le réactiver dans leur propre intérêt.
Mais ces 40 ans ne peuvent être évoqués sans le point central de toute cette épopée: les auditeurs qui sont les seuls véritables maîtres du jeu et les vrais patrons de l’ensemble des antennes.
Qu’ils soient remerciés pour toutes ces années d’écoute, d’encouragement, de tolérance souvent aussi.
Ils constituent la motivation unique de tous les acteurs de la radio et ce qu’ils oublient le font toujours, systématiquement sans exception, à leurs dépens.
Revivez avec-nous cette journée mémorable, les 40 ans des radios locales !